Il y a quelques semaines, nous vous faisions découvrir cette pratique baptisée "coal rolling", qui consiste à enfumer littéralement une voiture électrique dans un nuage noir et nocif. Une pratique évidemment complètement illégale qui s'en prend notamment aux propriétaires de Tesla, avec des vidéos de l'enfumeur (souvent un gros pick-up dont le filtre à particule a été retiré) ou de l'enfumé souvent partagées sur internet.

Tout ça pour dire qu'avec l'arrivée progressive, quoi qu'un peu brutale pour certains, de l'automobile dite "zéro émission", c'est un fossé qui s'est creusé entre les partisans du moteur à explosion, et ceux du moteur électrique. À quoi bon alors que tout le monde partage les même routes ?

Toujours est-il que deux frères, Daniel et Tim Bleakley se sont mis en tête de faire changer d'avis sur la voiture électrique des personnes qui, a priori, sont plutôt de l'autre côté de la barrière, car travaillant dans l'industrie du charbon. En réalité tout a commencé quand l'un des frères en question s'est acheté une Tesla et a fait testé sa voiture à son frère, justement travaillant dans cette industrie.

Bluffé par ce que peut produire cette énergie "verte" (évidemment à prendre avec des pincettes car l'électricité n'est pas toujours produite de manière très vertueuse, c'est peu de le dire), il a décidé de filmer la réaction ses collègues au volant de la Tesla. 

Il faut préciser que les frères Bleakley ont grandi à Clermont, dans le Queensland, en Australie. La ville est une plaque tournante pour plusieurs grandes mines de charbon de la région, et ce n'est pas le genre d'endroit où l'on s'attend à trouver beaucoup d'amateurs de véhicules électriques - la plupart des résidents conduisent d'énormes pick-ups, quand ils ne conduisent pas des machines géantes d'extraction du charbon.

Les goûts de M. Bleakley en matière d'automobile sont un peu plus progressistes : il possède une Tesla Model 3 Performance, et il adore faire la démonstration de ses caractéristiques, en particulier du 0 à 100 km/h en trois secondes, à ses voisins et collègues. Et lorsqu'ils découvrent pour la première fois l'accélération fulgurante de la Tesla, ils ont tendance à utiliser un langage plutôt fleuri.

L'un des amis de Bleakley, "le plus grand fou de voitures de Clermont", compare l'accélération au décollage d'une fusée. "Je le connais depuis que je suis enfant. Il possède ces incroyables V8 à haute performance", dit Bleakley. "Le voir conduire la Tesla et aimer la voiture pour moi était vraiment spécial. C'est là que j'ai compris que j'étais vraiment sur quelque chose."

Les frères Bleakley espèrent faire plus que juste gagner la confiance de quelques amateurs de gros V8. L'un de ses invités au volant était Bob Katter, membre du Parlement australien, qui ne s'est pas empêché de crier "Yee-haw !" lorsque le couple instantané de la Model 3 l'a cloué à son siège. Le député indépendant dit qu'il aimerait voir l'Australie développer sa propre industrie des VE et des batteries.

Il faut dire que l'Australie a pris beaucoup de retard sur les autres pays développés dans la transition vers les véhicules électriques. Les véhicules rechargeables ne représentaient que 0,6 % des ventes de voitures neuves en 2019, et ils ne bénéficient que de peu ou pas d'aides gouvernementales. Ils sont même au coeur du débat politique, le Premier ministre Scott Morrison ayant parlé des voitures électriques comme d'une menace pour les SUV bien-aimés des Australiens, et a accusé son adversaire électoral, qui préconisait un soutien gouvernemental accru pour l'adoption des VE, de vouloir "mettre fin au week-end."

La sensibilisation aux VE est faible, mais M. Bleakley, qui a travaillé pendant des années dans l'industrie pétrolière et minière, espère faire sa part pour changer cela, et de manière ludique. "Le militantisme traditionnel consiste à dire stop, ou à dire non", dit-il. "Mais ici, on dit : 'Voici un incroyable vaisseau spatial venu du futur et vous pouvez le conduire'. C'est un avenir que nous pouvons tous avoir si nous le choisissons."