Alors qu'il reste 20 ans à la voiture thermique pour exister en tant que produit neuf, l'alternative pour le moment choisie est le véhicule électrique. Parfois décrié pour la pollution engendrée à la fabrication des batteries ainsi que pour son recyclage, le véhicule électrique a déjà prouvé qu'il est plus propre que son concurrent diesel. Mais pour le moment, la voiture électrique représente 2,1 % des ventes et 0,5 % du parc automobile français. Néanmoins, et malgré de nombreuses réticences, l'électrique est loin de laisser les Français indifférents.

Une étude réalisée par le cabinet Oliver Wyman révèle que 78 % des personnes interrogées sur un échantillon de 1060 personnes se sont exprimées positivement au sujet du 'zéro émission', se disant intéressées par les voitures électrifiées, ce qui regroupe donc véhicules électriques et hybrides rechargeables. L'intérêt pour ces technologies ne se retrouve ni dans un niveau de revenus en particulier, ni dans une tranche d'âge ou une géolocalisation particulière, et 21 % des sondés se sont déjà renseignés à ce sujet.

Cependant, l'électrique n'a encore pas bonne presse pour plusieurs raisons, et plus de la moitié des gens interrogés (51 %) estiment que ces voitures sont achetées par des automobilistes roulant peu, ou dans un secteur limité. Seulement 14 % pensent qu'une voiture électrique peut être achetée par n'importe quelle personne, mais 51 % jugent que dans 5 ans, ce sera accessible à tous les revenus et toutes les situations. Et ces méfiances actuelles viennent de trois raisons principales.

Trois facteurs principaux de méfiance

Le premier est le prix d'achat des véhicules, puisque 57 % jugent que le prix d'un véhicule électrique neuf ne sera pas au même tarif que son équivalent thermique avant 2025. Et les consommateurs, bien que sous-estimant parfois le prix des véhicules électriques, sous-estiment également les aides apportées pour se porter acquéreur d'une telle voiture. 

La deuxième grande inquiétude se situe au niveau de l'autonomie des voitures, que 56 % des personnes jugent insuffisante. Un pourcentage conséquent qui gagne même 10 points lorsque les questions se posent dans une agglomération de moins de 100'000 habitants. De plus, et c'est la troisième raison du scepticisme des Français, le manque d'infrastructures de recharge inquiète toujours plus et pousse les gens à penser qu'il faut compter sur les recharges à domicile avant tout. Et cela confirme une chose, c'est que le manque d'information sur les voitures électriques mène fort logiquement à un manque de confiance de la part des Français.

'

Le cabinet Oliver Wyman révèle en effet que les remarques revenant le plus étaient liées à un manque de confiance envers les constructeurs et envers les données fournies, que les gens jugeaient "loin de la réalité". Dans l'ensemble, trois remarques ressortent souvent : l'électrique n'est pour l'instant qu'un rêve, les concessionnaires sur-vendent l'autonomie des voitures électriques, et le 'zéro émission' n'est qu'un effet de mode.

Le premier point peut encore s'expliquer par le faible pourcentage de voitures 'zéro émission', qui n'inspire pas les gens à la confiance suffisante pour se lancer. Le deuxième point est en revanche erroné, puisque le cycle WLTP a tendance à jauger plutôt bien l'autonomie de l'électrique. Enfin, le troisième point est de loin le plus discutable, puisque le dérèglement climatique et le besoin de réduire les émissions fait de l'électrique et de la disparition du thermique un enjeu d'avenir.

Il suffit de mieux informer les automobilistes

L'évolution du véhicule électrique et des technologies fait que l'autonomie des voitures a largement augmenté. Aujourd'hui, seules les plus petites voitures ne peuvent pas atteindre 300 km avec une recharge, et l'on trouve désormais des modèles atteignant sans problème les 600 km. Seulement, l'image peu efficace des premières voitures électriques colle à la peau des nouvelles.

Il a en effet été demandé aux sondés d'estimer l'autonomie d'une Renault Zoé, qui est le modèle le plus vendu en France, et plus de la moitié l'ont jugée inférieure à 250 km. Or, la voiture annonce plus de 300 km en cycle WLTP et l'on sait qu'elle peut accomplir plus de 500 km dans sa version R110, celle avec la plus grosse batterie. Enfin, 80 % des gens surestiment le coût d'une recharge de Renault Zoé à domicile, qui plafonne à 5 euros, et que certains automobilistes ont parfois estimée à 50 euros.

Une fois informés du coût réel de la recharge, mais aussi de l'entretien qui, contrairement aux croyances populaires, est bon marché, près de 40 % des gens ont changé leur perception du 'zéro émission'. Néanmoins, ils sont aussi nombreux à ne pas changer leur perception de la voiture électrique, une fois ces informations reçues.

Quatre archétypes de réaction face à l'électrique

L'étude menée par Oliver Wyman fait ressortir quatre profils types face à la voiture électrique. Le plus représenté, à 38 % des sondés, est celui du "rationnel peu exposé". Il s'agit typiquement d'un propriétaire habitant en maison individuelle, qui vit en périphérie d'une agglomération et se préoccupe de l'autonomie. Il s'agit d'une personne potentiellement très intéressée car très rationnelle dans ses investissements et ses dépenses, et donc ouverte à une transition vers l'électrique.

L'autre profil type le plus représenté est le "citadin exigeant", qui est intéressé mais ne s'estime pas assez informé. Inquiet de l'accès aux bornes libre-service à proximité de son domicile, il veut une offre combinant le véhicule, son entretien, et un forfait pour la recharge. Sa priorité est surtout d'avoir des informations. 

Le troisième profil est également urbain, il s'agit selon l'étude du "jeune père de famille renseigné" (18 %), un automobiliste urbain qui est pour le passage à l'électrique mais souhaite se tourner vers une marque ou un concessionnaire de confiance. Peu enclin à s'encombrer de services additionnels, il visera un achat rentable immédiatement. Le dernier profil, qualifié de "dubitatif", est représenté à 9 %. Il s'agit d'un consommateur fortement opposé à l'électrique, qui refuse de recevoir des informations sur le coût et les performances de la voiture. 

Une information différente qui change les mentalités

Ces quatre profils différents privilégient différents canaux d'information, puisque les trois premiers seront plus à même de se tourner vers la presse spécialisée ou les constructeurs pour être informés. Le "citadin exigeant" sera par ailleurs très curieux des solutions qui lui sont proposées. En revanche, les personnes fermement opposées à la voiture électrique sont plus à même de s'informer via les réseaux sociaux et les blogs, et ne voudront aucune information émanant de la presse ou des constructeurs. 

Le développement de la voiture électrique n'en est donc qu'à ses balbutiements, mais il est évident qu'il s'agit d'une solution d'avenir, d'autant que l'extraction du lithium et l'utilisation de cobalt diminueront avec le développement des technologies, permettant d'augmenter la propreté de ces véhicules et d'en faire une solution durable dans le futur. 

Désormais, les enjeux sont dans les mains des acteurs du milieu, et notamment des constructeurs, qui doivent communiquer de manière plus ciblée et proposer des offres permettant aux personnes hésitantes de franchir le pas. Bien évidemment, la balle est aussi dans le camp du gouvernement, qui doit continuer à aider financièrement cette transition, mais aussi à préparer le territoire à l'utilisation de ces véhicules.

Car finalement, deux des trois points qui empêchent aujourd'hui les gens d'être sereins face à l'électrification dépendent essentiellement de la volonté des autorités à agir, en augmentant drastiquement les infrastructures de recharge, mais aussi en offrant de vraies opportunités financières aux automobilistes intéressés d'avoir les moyens de se tourner vers le 'zéro émission'.

Source : Une étude Oliver Wyman